L'enjeu de la coopération : La parole à...
Alex Roy, Responsable du Département Démarches de Développement Durable de la DREAL Bourgogne-Franche-Comté

Interview de septembre 2020, Pascale Repellin pour Repères n° 81

Le maillage territorial : un enjeu pour amplifier la transition socialécologique

 

Depuis début 2019, la direction régionale du ministère de la transition écologique de Bourgogne Franche-Comté, la Maison des Sciences de l’Homme de Dijon et le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement mène un projet de recherche action participative intitulé « BFC en transition ». Celui-ci vise à favoriser la coopération entre les acteurs territoriaux dans une perspective commune de transition socialécologique, c’est-à-dire une transformation de la société en articulant des enjeux sociaux (lien social, lutte contre la précarité) et écologiques (changement climatique, biodiversité…).

Deux territoires d’expérimentation ont été sélectionnés : l’aire urbaine de Belfort-Montbéliard-Héricourt-Delle autour de l’association In’Terre ActiV et la communauté de communes des Bertranges autour de l’expérimentation Territoire Zéro Chômeur de Longue Durée de Prémery. Des acteurs locaux (citoyens, élus, chercheurs, agent de collectivités, associations, entreprises…) se sont mobilisés dans des ateliers participatifs pour faire émerger des actions concrètes sur leur territoire, mais aussi des réflexions à des échelles plus larges. Le 4 décembre 2019, des ateliers régionaux se sont déroulés à la Maison des Sciences de l’Homme de Dijon pour faire le bilan de la démarche et coconstruire les suites*.

Quels enseignements pouvez-vous tirer de ces démarches territoriales de transition ?

Tout d’abord, le projet « BFC en transition » a mis en lumière l’existence d’un domaine d’activités socialécologiques construit d’initiatives collectives hybrides à la frontière d’une multitude de secteurs professionnels, associatifs et citoyens (ESS, secteur socio-culturel, EEDD, insertion professionnelle, éducation populaire, politique de la ville, secteur agricole, santé, milieux militants ou citoyens, économie circulaire, développement local, naturaliste...). Toutefois, ces initiatives restent fragiles (avec des difficultés financières notamment) parsemées et parcellaires. Ce domaine n’est pas homogène, ses contours sont flous même s’il présente quelques traits marquants : la recherche d’un mode d’action coopératif et d’un pouvoir d’agir citoyen ainsi qu’une volonté d’articuler les enjeux sociaux et environnementaux.

En quoi la coopération des acteurs est un élément clé de ces dynamiques territoriales ?

Les initiatives de transition socialécologique s’ancrent dans des écosystèmes partenariaux locaux qui organisent, de manière informelle et partielle, la « débrouillardise associative » : des rencontres d’acteurs en fonction des opportunités, des appels téléphoniques, des opérations de mutualisation, des journées d’échanges, des exercices d’analyse de la pratique. Cependant, dans un contexte de concurrence associative pour obtenir des financements, ces écosystèmes restent partiels, fragiles et non-organisés.

Les participants au projet « BFC en transition » ont ainsi relevé un enjeu de mise en synergie entre les initiatives citoyennes, associatives et politiques œuvrant sur les enjeux sociaux, démocratiques et écologiques. C’est ce que nous appelons une activité de maillage territorial.

Celui-ci consiste à construire et à pérenniser des dynamiques collectives. Selon les participants à « BFC en transition », ces dynamiques doivent reposer sur un cadre de relations horizontales afin de favoriser un processus de foisonnement et de diversification des initiatives qui peuvent progressivement s’autonomiser ou disparaître au profit d’autres. Dans une optique de transition socialécologique, cette activité de maillage repose également sur un objectif de décloisonnement entre les acteurs du secteur socio-culturel et du secteur environnemental.

Pour amplifier la transition, les participants au projet de recherche action participative ont mis en avant un besoin d’ingénierie de maillage territorial, avec des acteurs relais qui se donnent pour mission de mobiliser d’autres acteurs et d’organiser la diffusion des pratiques sur leur territoire. Le maillage territorial nécessite, en effet, un certain nombre de compétences administratives, d’animation, de facilitation, de mobilisation et de médiation.

L’aspect « souterrain » de l’activité de maillage – moins visible que les « actions concrètes » – complexifie sa valorisation et donc son financement auprès des pouvoirs publics notamment. C’est également la pratique des appels à projets ponctuels qui est remise en question, car en soutenant principalement l’émergence de nouvelles actions, elle met de côté les enjeux de mobilisation et de pérennisation.

Pour conclure, les participants au projet « BFC en transition » mettent en avant :

  • Un besoin de reconnaissance de la spécificité des compétences requises pour faciliter l’émergence et l’essaimage des initiatives de transition ;
  • Un besoin de valorisation de la diversité de postures possibles pour faciliter la mise en œuvre de dynamiques de transition (associations, collectivités, état, collectifs citoyens...) ;
  • Un besoin d’innovation dans les contenus de formation pour répondre aux objectifs de décloisonnement et de coopération.

* Retrouvez l’ensemble des documents de capitalisation de la démarche sur le site cooperationtransition-bfc.fr.

Pour en savoir plus :

www.cooperationtransition-bfc.fr

 

Septembre 2020 - Interview réalisée par Pascale Repellin dans le cadre de Repères n° 81


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